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L’allaitement maternel

Des recettes au regard : accompagner, soigner, et non enseigner

                                                                                Dr Marie Thirion - Pédiatre 

Texte de conférence au congrès de Maternologie

Versailles 9-10-novembre 1999

Publié dans: Les cahiers de maternologie n° 13

Les raccourcis historiques sont toujours faux, toujours réducteurs. Travailler strictement dans le présent et ne plus regarder d’où viennent nos pratiques altère tout autant notre ancrage professionnel. Essayons de faire le point.

  UN PEU D’HISTOIRE :

Au début de ce siècle, les jeunes accouchées -déchargées de toute obligation familiale-- restaient dans leur lit 21 jours. En 1960 le séjour en maternité durait 10 à 12 jours. En 1980 il fallait signer une décharge pour sortir avant six jours. En 1999 la plupart des maternités laissent partir les mères à trois ou quatre jours. Si l’on écoute les discours des économistes de la santé cette évolution va se poursuivre ce qui laisse penser que, dans très peu de temps, le retour à la maison aura lieu dès 24 ou 36 heures après l’accouchement. Les mères se doivent donc de « récupérer»  et devenir autonomes de plus en plus vite, deux fois plus vite tous les cinq ans  !

Dans le même temps, l’évolution des services est passée par de grandes étapes facilement repérables :

  • Il y a eu l’accompagnement de femmes à femmes, de femmes « sages » à femmes « neuves »
  • Il y a eu ensuite la grande vague de l’ « éducation sanitaire » hygiéniste et comportementale
  • Il y a eu le développement de l’obstétrique moderne, technique et facilement chirurgicale.
  • Il y a eu la phase « pédiatrique », médicale et sécuritaire, prenant chaque nouveau né pour un éventuel « malade ».
  • Il y a eu la phase « accueil naturel » de l’enfant, parfois au détriment de la mère. 
  • Il y a eu la phase « psychiatrique » où l’écoute, la communication, la prévention des troubles de l’attachement ont pris peu à peu leur place.
  • Il y a maintenant les protocoles-qualité et les économies de santé……

 

Pourtant le plus grand changement des Maternités hospitalières -publiques et privées-- en cinquante ans, c’est sûrement celui des personnes en présence :

  • Le nouveau né a pris la première place, devenant l’ « enfant roi » des médecins et des équipes soignantes, tout autant que des parents et des publicitaires
  • Si les Hôpitaux n’accueillaient jusque dans les années d’après guerre que les femmes de niveau social défavorisé, maintenant au contraire les femmes aisées et cultivées y viennent aussi accoucher.  La France rurale et ouvrière s’est enrichie du vaste éventail des vagues d’immigration. Il y a des jeunes femmes très protégées et encadrées par leur communauté d’origine, d’autres complètement isolées et perdues. De la jeune écolière paumée, au professeur d’université, de la primipare à la mère de famille nombreuse, les nécessités de soins sont les mêmes, pas celles d’apprentissage.
  • Les professionnels soignants –souvent très jeunes-- qui accompagnent la naissance et le séjour hospitalier mère-bébé sont de plus en plus formés, diplômés, compétents, avec de fortes bases professionnelles, acquises pour d’autres services (de médecine d’adulte ou de néonatologie avec réanimation par exemple), mais études purement techniques où les sciences dites « humaines » sont gravement absentes. Ils vont se retrouver pour 10 % de leur temps de travail dans des soins de haute technicité et pour 90 % à des tâches que mères, grand mères ou voisines ont remplies sans grande difficulté au cours des siècles…..pour lesquelles ils n’ont aucune formation particulière et qu’ils vont apprendre « sur le tas » avec les anciens du service. Ils sont donc formés à la culture dominante d’une équipe. Il s’ensuit d’énormes variations de pratiques d’un hôpital à un autre, même dans la même ville donc, a priori, avec les mêmes enseignements initiaux.  

 

LES REPERCUSSIONS DE TELS CHANGEMENTS

L’apport sédimentaire de tous ces changements se retrouve dans les pratiques des soignants de maternité. Des savoirs et des habitudes de toutes ces périodes s’harmonisent, se télescopent, s’estompent ou se rigidifient au hasard des équipes et des évènements. On les retrouve dans ces multiplications d’actions complexes, activement enseignées aux mères et transmises sans recul dans une grande incohérence des discours et des réponses….  oubliant parfois la seule question réelle : Lors d’une naissance de quoi ont réellement besoin les jeunes mères, leurs bébés et les autres membres de la famille ?

Je voudrais illustrer ces propos par trois exemples quotidiens et actuels des services : la toilette des bébés, l’accompagnement de l’allaitement maternel et le discours de l’environnement.  Ce que je tente ici est évidemment partial et incomplet, mais a pour but de repérer, dans ce que nous voyons et entendons, les différents « sédiments » qui sont le fondement du travail quotidien, l’objectif étant d’évaluer la pertinence des pratiques et les moyens d’évolution. 

 

1°) La toilette des bébés : modèle de sédimentation professionnelle :

Depuis les années 1975, presque toutes les maternités de France permettent à la jeune mère d’assister à la toilette de son bébé, de la faire elle même à partir du deuxième ou troisième jour, en tout cas au moins une fois avant le retour à la maison.  Mais quelle toilette ? 

  • Une toilette du siège avec lavage sommaire avec la partie propre de la couche souillée… ….ce qui était l’unique soin des bébés jusque dans les années 1930.
  • Un déshabillage complet sur un plan de travail, avec lavage au gant de toilette ou à la compresse savonneuse, insistant longuement sur les parties planes (toujours propres !) et cherchant à atteindre les plis alors que les bébés soumis aux fortes sensations de l’air sur la peau mouillée se crispent en flexion et hurlent. L’ordre de passage du linge savonneux sur le corps est rigoureusement codifié, reproduisant les soins d’un malade alité non mobilisable ou grabataire, tels qu’enseignés aux aides-soignantes depuis les années 1950. Le cordon est soigneusement évité
  • Puis vient le temps du bain ou de la douche pour « rincer ».  Ce rinçage date lui des années 1975 où l’on a envisagé sans crainte de mouiller le cordon ombilical dès les premiers jours. Il ne s’agit guère d’un moment de détente ou de plaisir. L’accent est mis sur l’élimination de toute trace de savon, certains services allant jusqu’à rincer à la douche après le bain…..
  • Après un séchage soigneux des plis, l’enfant est partiellement rhabillé avant de « faire le cordon ». Désinfection à l’alcool ou à l’hexachlorophéne, colorants, cordons laissés à l’air hors de la couche, ou dans la couche, ou sous un pansement dans la couche…..Selon les services, la mère devra se conformer à tel ou tel de ces schémas. Pourtant depuis les années 1980, les chirurgiens nous ont appris qu’une plaie savonnée chaque jour et séchée n’a besoin de rien d’autre.
  • Enfin le visage avec plusieurs compresses stériles (pourquoi stériles ?) en commençant par le front puis les joues puis le menton, puis derrière les oreilles de haut en bas et dans les oreilles de bas en haut. Puis les fusettes de coton roulé, dans chaque narine (deux ou trois de chaque coté) et parfois encore dans les oreilles…. Et enfin les yeux : de l’intérieur vers l’extérieur ou l’inverse, ou de bas en haut dans l’angle interne…. Le must depuis quelques années est d’utiliser pour l’ensemble de ces soins une dosette de sérum physiologique stérile (pourquoi stérile là encore ?)  ce qui veut dire que les bébés sont le visage rincé à l’eau salée. (Avez-vous essayé comme c’est inconfortable ?) .

 

 Ce modèle de toilette –utile pour un prématuré dans sa couveuse ou un bébé opéré- n’a guère de sens pour un bébé en pleine forme ni pour sa mère douloureuse et fatiguée après l’accouchement. Il vaudrait mieux le laisser gigoter simplement dans son bain, avec une main douce qui savonne les plis et le crâne, rince doucement, puis sèche dans tous les coins, avec une serviette propre. Toutes les mères sauraient faire sans problème. Les soignants n’auraient qu’à surveiller les deux points de fragilité : l’état du cordon et les soins d’une éventuelle conjonctivite. 

Pourtant c’est le modèle hospitalier qui est montré et imposé (j’ai compté jusqu’à 63 injonctions au cours d’une même toilette !). À quelques variantes près, ce déroulement est d’ailleurs repris chaque année, avec des photos explicatives, dans toutes les revues pour jeunes parents.

Nul ne semble mettre en balance les authentiques inconvénients – médicaux et psychologiques-- de ce « cérémonial-- savoir faire » :

 

  • Fréquents malaises des mères trop longtemps debout, peu de temps après leur accouchement, dans une pièce trop chauffée.
  • Refroidissements des bébés trop longtemps nus à l’air. Les cyanoses péribuccales ou généralisées ne sont pas rares. Il est démontré que les refroidissements sont la cause première d’hypoglycémies chez le nouveau à terme sans antécédents particuliers, hypoglycémies qui font entrer les mères dans le cercle vicieux des peurs et des compléments alimentaires. Pour certains bébés fragiles, ayant souffert pendant l’accouchement ou en déséquilibre énergétique, ces refroidissements peuvent même entraîner des malaises cardio-respiratoires graves nécessitant des gestes de réanimation très impressionnants pour les parents et l’entourage.
  • Les bébés dans leur berceau se salissent-ils tant qu’ils aient besoin d’être savonnés de la tête au pied chaque jour comme un travailleur de force qui a beaucoup transpiré ? Le siège, oui, mais pas tout le corps. Savonner chaque jour, c’est enlever la protection lipidique naturelle de la peau, donc favoriser déshydratation cutanée, fissures et portes d’entrée infectieuses.
  • Le « savoir » enseigné est tellement complexe qu’il ne me paraît pas possible qu’une jeune mère en retienne tous les détails pendant les trois ou quatre jours de son séjour en maternité. Je serais moi-même bien en peine de le reproduire sans erreur si on me demandait de refaire l’ensemble du protocole, avec derrière moi une personne contrôlant chacun de mes gestes.
  • Pour certaines jeunes mères venant d’une autre culture (peur de déshabiller, peur du mauvais œil, peur de l’eau quand les massages à l’huile sont seuls admis…) ces gestes sont impossibles à reproduire ou alors dans un affrontement douloureux avec les femmes du groupe d’origine.
  • Le plus grave inconvénient de ce modèle de soins, qui découle de tous les autres, c’est bien sûr d’induire peur, incohérence des gestes, obsessions, sentiment d’incompétence. Nous sommes allés trop loin dans l’enseignement. Le métier de maman n’est pas celui de puéricultrice de néonatologie. Il est temps de revoir cette puériculture hygiéniste et contraignante débutée vers 1890, au début de l’ère pasteurienne. Des gestes tout simples, facilement reproductibles à domicile, avec un minimum de matériel, exécutés devant les mères par un soignant puis par les mères dès qu’elles se sentent d’attaque seraient plus rassurants. Nous savons bien que les jeunes mères sont durement stressées. Évitons de leur imposer un modèle « inapprenable ».

 

2 °) l’allaitement maternel, modèle de sédimentation émotionnelle

L’allaitement maternel n’a jamais été enseigné. Les quelques notions de physiologie de la lactation et de traitement des complications qui sont le bagage commun de toutes les catégories professionnelles sont insuffisantes pour comprendre ce que vivent les jeunes mères et adopter une attitude médicale raisonnée et consensuelle. De plus les seins des femmes et leur fonctionnement ouvrent tout un univers fantasmatique puissant :

  • pudeur des mères et pudeur des soignants, empéchant un regard clinique objectif (sur l’érectilité du mamelon par exemple) 
  • images indicibles de corps à corps où l’enfant stimule sa mère pour susciter un écoulement
  • images symboliques de la complétude et du manque conduisant à un retour plus ou moins douloureux vers nos propres origines 
  • étape très intime de tendresse et de dé fusion des corps suscitant attirance, rejet ou jalousie inconsciente
  • nostalgie de nos temps d’enfance ou de nos temps de parentalité
  • colère ou tristesse latentes d’une histoire personnelle mal vécue ou trop bien vécue 
  • peur de cette fusion corporelle intense …..

 

Les soignants ne peuvent rester neutres. La faiblesse des connaissances théoriques, l’absence de repères laissent la place à une intense implication émotionnelle (positive ou négative) où chacun, chacune se positionne comme il peut. La solitude est majeure. Dans une grande incohérence d’une personne à l’autre, les équipes vont chercher une protection, une barrière à la peur de mal faire ou d’en faire trop, ou de ne pas en faire assez, ou d’être impliquées trop personnellement. Cela conduit à des comportements, très peu scientifiques, mais efficaces contre l’angoisse :

  • l’instrumentalisation des tétées : pesée avant et après, interventions manuelles abusives pour « faire une mise au sein », tire-lait, coupelles, protège mamelons en silicone, tasses, cuillères, et autres modernes outils qui sont le quotidien des services ; outils qui peuvent parfois aider lorsque l’indication est bien posée…… mais qui utilisés à contretemps torpillent les allaitements.
  • L’interposition du lait social, l’aliment manufacturé fruit de la société, et pour être encore plus clair, le lait des soignants  sous forme de biberons de compléments, proposés sans justification médicale réelle, sans restriction et sans réflexion dans presque toutes les maternités.
  • Devant toute difficulté de mise en route de la lactation renvoyer la responsabilité à la mère : à ses bouts de sein « mal formés » (cela n’existe pas, mais tout le monde en parle !), ou pire encore à sa trop faible « motivation » (alors que l’écoulement du lait est inconscient et involontaire).

 

Il existe portant des bases physiologiques claires et des signes cliniques précis qui permettent d’accompagner au mieux ce temps de démarrage de la fonction lactation. Il est possible d’enseigner en 20 lignes les signes que tout va bien (signes de bonne technique de bouche des bébés et signes de l’écoulement actif du lait) et en 10 lignes les gestes à éviter (séparation, contrainte physique du bébé, phrases négatives qui bloquent la commande hypothalamique).

Mais ces messages élémentaires ne passent guère, parasités par le poids séculaire des images négatives et des interdits qui sont l’une des grandes spécificités françaises. 10 siècles de refus ne se corrigent pas en quelques lignes. Tant que les personnes qui accompagnent la naissance n’auront pas plus de recul historique, ethnologique, psychologique..…. je ne sais pas qu’elles seront les stratégies possibles d’évolution.

Ce que je sais dans ma pratique de formatrice de formation continue c’est que le simple apport de connaissances théoriques ou de recettes pratiques n’a presque aucun impact. Les équipes ne peuvent se mobiliser que si l’on a pu –au delà des connaissances- toucher le « noyau dur émotionnel », laisser dire ce qui veut se dire dans une écoute respectueuse, et recentrer la sécurité du groupe de stagiaires sur les attentes professionnelles de leurs équipes. Il y faut donc du temps…… Et un projet de service cohérent !

 

3°) Le discours de l’environnement, modèle de sédimentation culturelle

 Le poids du groupe humain, l’envahissement de l’intime, la domestication des corps, ont toujours été les mécanismes fondamentaux de l’intériorisation du social... Autour des berceaux, les langues se délient. Familles, amis, voisins, soignants de tout acabit, et toute personne qui entre dans la chambre de la jeune accouchée a un mot à dire sur ce bébé et la « bonne » manière de se comporter avec lui.

Avec l’évolution sociale et culturelle de ces dernières décennies, le modèle autour de la naissance s’est considérablement alourdi. Hygiène préventive, croyances, éducation, liberté, apprentissage, pudeur, responsabilité pénale, conduites routinières, éducation, préceptes médicaux, psychologie, médecine scientifique et pratiques symboliques alternent dans un ensemble de règles hétéroclites. Au sein des équipes, dans les conversations des relèves ou les prescriptions de soins se transmettent –plus ou moins inconsciemment- les mêmes schémas, les mêmes paroles, témoins d’usages sociaux du corps, d’une pratique « bricolée » devenue  culture médicale  

Il est possible d’entendre dans la même équipe, le même jour des choses totalement contradictoires. Je n’en citerai que quelques très brefs exemples :

  • Dire à une jeune mère de laisser son bébé dans son berceau car elle va le gâter, lui donner de mauvaises habitudes mais proposer de faire un signalement pour une autre qui ose lire pendant les tétées sans regarder son bébé dans les yeux.
  • L’interdit des enfants de la fratrie qui pourraient apporter des microbes, mais le maintien en poste pour manque de personnel des agents enrhumés ou malades
  • L’angoisse ancestrale de la famine, -devenue dans sa forme moderne la crainte irraisonnée de l’hypoglycémie-, voisine avec l’image moyennageuse du nourrissonvorace et dangereux  qu’il convient de régler au plus vite.  Le contrôle strict des horaires, des rations et des courbes de poids voisine donc avec les compléments systématiques et les pratiques de suralimentation.
  • La mère potentiellement dangereuse, celle qui peut étouffer son bébé en lui donnant le sein, celle qui va le laisser tomber ou l’écraser dans son lit (les interdits touchant ces représentations sont très actifs) est aussi la mère des interrelations positives, celle des vécus corporels et émotionnels, des projections structurant la croissance cérébrale, le développement harmonieux, la pensée, la vie émotionnelle de son enfant.

 

LES CONSEQUENCES

Inutile de dire à quel point ce mélange d’images extrêmes allant de nos préjugés populaires à la recherche de pointe crée une incohérence difficile à vivre.

  • Pour les mères bien sûr, qui sont littéralement inondées d’informations et d’injonctions contradictoires. Elles sont tout à la fois infantilisées et responsables, coupables et incapables, envahies mais démunies. Il faut une très solide personnalité pour vivre cela sereinement en attendant de rentrer à la maison. Pour toutes les autres, de plus en plus nombreuses et dans toutes les catégories sociales, stress, panique, angoisses profondes, dépression sont donc au rendez-vous.
  • Pour les soignants autour de la petite enfance, ce n’est pas plus facile. Alors que tout le monde parle de protocoles, de qualités de soins, de cohérence d’équipe, nous voyons les confusions des rôles, nous voyons comment les vieilles attitudes résistent, comment les personnes s’affrontent pour maintenir des habitudes -rassurantes parce que connues-- et nous voyons la « pénibilité » du moindre changement.  Nous voyons aussi comment s’oublient les connaissances théoriques importantes, parasitées par quelque souvenir d’événement traumatique réel ou rapporté.

 Améliorer la qualité des soins et de l’accompagnement nécessiterait de revenir à la seule question réelle : Lors d’une naissance, de quoi ont réellement besoin les jeunes mères, leurs bébés et les autres membres de la famille ?

Nous le savons tous, les études récentes largement divulguées le démontrent à l’envi : toute interposition entre la mère et son bébé pendant cette période vulnérable est préjudiciable à l’attachement et à leur équilibre. Nous savons aussi que les trois premiers jours après la naissance sont les plus vulnérables de tous, ceux où mère et bébé ont à se découvrir mais sont en perpétuel décalage l’un par rapport à l’autre.

Il est donc temps de changer l’hospitalisation post–accouchement, de simplifier les gestes, de mieux coordonner les discours. Mais comment, que peut-on faire ? Je n’ai que des interrogations :

  • Favoriser –comme le font nos collègues scandinaves-- le contact physique étroit permanent de la mère et du bébé, dans le même lit, ce qui permet, ils nous l’affirment, repos physique et bon sommeil?
  • Utiliser au maximum les temps d’éveil actifs du bébé  en particulier les précieux instants d’après la naissance –là encore ce sont les scandinaves qui nous l’ont montré- pour le laisser faire activement connaissance avec sa mère et prendre avec elle leur repères respectifs, pour le meilleur démarrage possible des allaitements ?
  • Ne plus déshabiller totalement les bébés, ne pas les laver chaque jour-- ce que font les maternités allemandes pendant toute la première semaine-- et retrouver les massages et onctions à l’huile pour protéger la peau ?
  • Multiplier les unités de maternologie ? 
  • Former différemment les soignants, ouvrir l’éventail de leurs compétences pour leur apprendre à ne contrôler que le vrai risque, à mieux accompagner sans juger, à moins parler et mieux écouter ?
  • Trouver les moyens pour que les soignants – de toutes les catégories professionnelles du médecin à la femme de service- arrivent à se coordonner entre eux, à ne plus morceler leurs interventions mais - comme l’enseigne l’équipe de F. Molenat à Montpellier-- à agir en lien ?
  • Développer l’enseignement des méthodes d’observation clinique et psychanalytique (Esther Bick à Londres, Brazelton à Boston, Eva Sulcova à Prague) ?
  • Introduire dans les maternités, après les psychiatres, des anthropologues ou des ethnologues pour analyser à grande échelle les répercussions de nos pratiques sur la « dyade » mère bébé et sur l’équilibre des familles ?
  • Agir sur le Politique pour modifier certaines priorités économiques ?
  • ……….Si je devais ne formuler qu’une seule proposition, ce serait celle-ci : Renoncer à l’idée d’enseigner aux mères leur nouveau métier.  Trois jours c’est trop court. Le temps d’accueillir un bébé n’est pas celui d’aller à l’école. Les mères sont dans le ressenti et l’émotionnel, pas dans le rationnel ni la mémorisation. Comme le disait très bien une sage-femme : elles « n’impriment pas ». Mais elles ressentent durement l’envahissement, la moindre violence ou incohérence. Pourquoi leur imposer un discours que nous croyons rationnel, des techniques que nous croyons utiles et qui font monter l’angoisse.

Je n’ai formulé là que quelques hypothèses volontairement excessives et caricaturales pour ouvrir le débat sur un problème bien réel.

Si un jour dans les services un protocole simplifié se surajoute aux protocoles antérieurs, -comme c’est souvent malheureusement le cas- la culture administrative aura gagné

Si les interrogations que je pose, allégent un jour le poids des structures sur les mères et leur famille, ça valait la peine de vaincre ma peur de parler devant vous.

 

Terme des anthropologues du courant culturaliste comme Margaret Mead ou Erik Erikson reprenant les notions de « techniques du corps » de Marcel Mauss dans sa communication du 17 mai 1934 à la Société de Psychologie

Mélanie Klein 1952- Esther Bick 1962- W.R.Bion 1967- Zazzo 1972- Montagnier 1973- Stern et Brazelton 1974- M Haag 1983- Kreisler. Soulé. Fain- Lébovici 1983 -Hubel et Wiesel 1977 et tant d’autres….. dont nous tous ici

  

 

 

 

 

 

 

 

 

 


 

 




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